Les interviews

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Interview de Maurice Bernard

Responsable de la division Eau et Assainissement de l’AFD

 

 

 

Eve : Est-ce que vous pourriez vous présenter en quelques mots ?

 

Maurice Bernard : Je suis Maurice Bernard, je suis le responsable de l’Eau et de l’Assainissement à l’Agence Française de développement [AFD, http://www.afd.fr/] qui est l’opérateur de l’État français qui gère tous les financements de l’Aide Publique au Développement.

 

Eve : Nous avons entendu parler de votre parcours un peu hétéroclite, est-ce que vous pourriez nous en dire quelques mots ?

 

MB : Je ne le qualifierai pas forcément d’hétéroclite ! Je suis ingénieur, centralien de formation, il n’y a rien qui me prédestinait à « tomber dans le marigot », à m’occuper de l’eau. Je suis un enfant d’expatrié donc j’ai toujours été sensibilisé à la réalité des situations dans les pays en développement. Quand je suis sorti de l’école, j’ai commencé ma carrière en faisant un « VSN » on appelait ça à l’époque, c’était l’alternative au service militaire. Et puis j’ai eu la chance d’être affecté dans une ONG au Kenya. C’était juste avant qu’on consacre le principe du Développement Durable, en 1987 aux Nations Unies, mais cela faisait déjà une génération que les ONG travaillaient sur ce concept du Développement Durable, donc ça m’a donné une perspective différente et intéressante. Ensuite, j’ai choisi le domaine de l’eau par hasard. J’ai travaillé quatre ans dans un bureau d’ingénierie, ensuite pendant 4 ou 5 ans j’étais exploitant de service à la Lyonnaise des Eaux, ensuite je suis reparti m’occuper d’une direction générale d’un bureau d’études basé en Afrique de l’Est, pendant quatre ans, pour ensuite revenir en France et être entrepreneur. J’étais co-dirigeant d’une entreprise qui faisait essentiellement du conseil et de la prestation aux collectivités dans le domaine de la gestion des services d’eau et d’assainissement. Et puis en milieu de carrière, 45 ans, j’ai jugé que c’était le bon moment pour essayer de mettre ma compétence au service d’une mission plus publique !

 

Eve : Vous êtes rentré à l’AFD en milieu de carrière, vers 45 ans, est-ce que vous avez vraiment cherché à entrer ? Vous aviez déjà des contacts ?

 

MB : Non, je le voulais, après quasiment 20 ans d’expérience dans le secteur privé, un peu dans les collectivités, c’est un choix de carrière. Vous voulez faire des carrières hiérarchiques dans des grandes multinationales –moi ça n’a jamais été l’option que j’ai prise. Même quand j’étais dirigeant d’entreprise, j’ai toujours cherché à garder de la compétence, en me vendant moi-même en conseil. Le fond m’intéresse peut-être plus que les positions. Après cette expérience de chef d’entreprise, qui est quand même assez difficile – c’est du H24, J365, on travaille tout le temps, on a beaucoup de pression sur le chiffre d’affaires, le résultat… je voulais travailler pour un bailleur de fond donc j’ai fait le tour. J’ai eu des entretiens à la Banque Mondiale, à la Banque Interaméricaine [de développement], et le premier qui s’est concrétisé, c’est celui de l’AFD !

 

Clémence : Ce que vous faites aujourd’hui est-il encore en adéquation avec vos idéaux de jeunesse ? Quand vous étiez jeune professionnel ?

 

MB : Entièrement ! C’est en entière adéquation. Au fur et à mesure de l’âge, on devient un peu plus pragmatique peut-être. Les idéaux, quand ils sont confrontés à la réalité des situations, on devient plus force de proposition ou on propose des choses qui sont plus facilement applicables peut-être. L’AFD de toute façon, le métier en général  de l’aide au développement, c’est un métier où on ne retrouve que des gens qui son quasiment des missionnaires, des gens qui croient. La foi dans la mission est aussi importante finalement que l’intérêt de l’activité elle-même.

 

Clémence : Une dernière question, peut-être un peu plus ciblée sur ce forum : que représente pour vous le Forum DEFIS SUD ?

 

MB : Le Forum DEFIS SUD, ça représente une occasion de pouvoir dialoguer avec un plus grand nombre de jeunes professionnels. Je connais le Réseau Projection depuis son origine. Je vous avouerai que j’étais un peu sceptique au départ, je n’arrivais pas bien à voir ce qu’ils voulaient faire, ces jeunes professionnels qui prétendaient aller expliquer au reste du monde comment… Je trouvais ça un peu naïf. Et puis, en discutant avec Célia, et puis les autres fondateurs, et surtout en allant à une ou deux réunions du Réseau Projection, je me suis aperçu que la principale valeur ajoutée, le principal intérêt du réseau, c’était de permettre à des jeunes professionnels de dialoguer avec des gens qui ont déjà quelques années d’expérience, pour pouvoir évidemment dialoguer sur le fond et le contenu, confronter un certain nombre d’idées, mais aussi pour pouvoir trouver, ce qui n’est pas toujours facile, des interlocuteurs qui, dans un esprit libre, soient à même de partager leurs expériences, éventuellement de conseiller ou de donner quelques avis sur la manière de s’y prendre pour faire évoluer sa carrière. Et surtout, peut-être encore plus, sur le parcours professionnel que l’on veut construire, parce que, bien sûr on ne peut pas dire, quand on commence à travailler, que sa carrière va être comme ça et va finir comme ça, mais je pense que la continuité et la logique dans la progression de carrière est quelque chose de fondamental et qu’il y a un certain nombre de moments où il y a des choix à faire qui conditionnent la lisibilité et la cohérence du parcours global. 

 

Clémence : Merci beaucoup !

 

 

AFD, Aide publique au Développement, Coopération Nord/Sud

 

Le site de l’AFD : http://www.afd.fr/

La section Eau et assainissement de l’AFD :

http://www.afd.fr/jahia/Jahia/home/projets_afd/Eau_assainissement


 

 

Interview de Thomas Lejeune

Ingénieur Eau & assainissement

 

 

Eve : Bonjour Thomas ! Est-ce que tu pourrais te présenter ? 

 

Thomas : Je m’appelle Thomas Lejeune et je fais partie du Réseau Projection. Je suis venu sur le forum aujourd’hui pour assister aux débats, voir un peu les stands des différents intervenants.

 

Eve : Qu’est-ce que tu fais dans la vie ?


Thomas : Je suis ingénieur dans l’eau et l’assainissement. J’ai aussi fait un master en gestion de l’eau et je suis jeune professionnel dans le domaine de l’eau et l’assainissement.

 

Eve : Qu’as-tu fait à la sortie de ton école d’ingénieur ? Tu es allé dans un pays en développement, tu es revenu ? Comment ça s’est passé ?

 

Thomas : Dans le cadre de mes études, j’ai fait quelques stages, quelques missions dans des pays en développement : le Maroc, le Brésil, un petit peu au Cambodge. J’ai beaucoup aimé ces expériences, aussi bien sur le plan professionnel que sur le plan personnel. Là, je suis rentré en France et je travaille en France pour le moment. J’ai beaucoup aimé le Réseau Projection, parce que cela permet d’échanger ces expériences-là avec d’autres gens qui ont entre 2 et 10 ans d’expérience. Je fais partie des plus jeunes, mais du coup c’est intéressant de se confronter aux autres.

 

Eve : Est-ce que tu as participé aux débats aujourd’hui ? Qu’est-ce que tu en as retenu ? Est-ce que ça a fait évoluer tes idées sur les services essentiels au Sud ?

 

Thomas : Oui, c’est intéressant ! J’aime bien la formule du forum, déjà parce qu’il y a des intervenants du Sud qui sont venus. Notamment pour les gens qui veulent se diriger vers les services essentiels et qui n’ont pas encore eu l’opportunité d’y aller ou même, en y étant allé, c’est toujours bien de reparler de ces sujet-là. Ce sont des sujets qu’on a tous en commun en partant travailler dans les services essentiels dans les pays du Sud. On trouve un écho dans tous les questionnements qu’on a mais dont on ne discute pas forcément. Par exemple, est-ce que j’ai ma place dans un pays du Sud ? Qu’est-ce que je fais quand je reviens ? Comment est-ce qu’on peut valoriser cette expérience ? Des questions aussi très pratiques, sur les statuts, toutes les difficultés qu’on a, qui peuvent paraître comme un mur en face de soi alors qu’on a très envie, mais que parfois c’est compliqué. Il y avait des débats vraiment intéressants là-dessus, et puis un petit côté jeune, moderne dans le forum, que j’aime beaucoup – dynamique, les interventions ne sont pas très longues, du coup ça va vite, il y a du rythme. Et puis il n’y a pas de langue de bois, c’est chouette ! On discute un peu entre nous et j’ai l’impression qu’on se dit plus de choses.

 

Eve : Si tu avais un conseil à donner aux étudiants qui sont dans un master comme celui que tu as pu faire, et qui veulent partir travailler au Sud, qu’est-ce que ce serait ?

 

Thomas : Je n’ai pas beaucoup plus d’expérience que ces gens-là, donc je n’ai pas beaucoup de recul. La première chose, c’est que ça vaut toujours le coup. Parfois les difficultés paraissent énormes à surmonter, pour les départs etc., il y a toujours un peu d’incertitude en terme de statuts, il y a des difficultés liées à l’expatriation. Mais vraiment, je pense que le jeu en vaut la chandelle et qu’il faut surmonter ces petites angoisses et y aller, ça vaut vraiment le coup ! Il ne faut pas hésiter.

 

Eve : Merci !



 

Interview de Jean-Pierre Mas

Directeur délégué Afrique de Suez Environnement

 

 

Guillaume : Est-ce que vous pourriez vous présenter en quelques mots ?

 

Jean-Pierre Mas : Je suis Jean-Pierre Mas, directeur délégué Afrique. Je m’occupe en particulier du développement des activités de Suez Environnement en Afrique Sub-saharienne. Suez Environnement est un acteur de premier plan dans la gestion de l’eau, de l’assainissement et des déchets solides à travers les 5 continents. En particulier, on alimente en eau potable environ 90 millions d’habitants.

 

Jean-Denis : Pourquoi être ici aujourd’hui ?

 

Jean-Pierre Mas : Suez Environnement pense que l’association avec le Réseau Projection est une association très utile dans le sens où elle est un décloisonnement à la fois des jeunes professionnels diplômés et également entre générations, et également au niveau connaissance des métiers. Pas seulement l’eau et l’assainissement, mais aussi la gestion des déchets. Nous pensons que c’est une initiative importante, et notre présence en particulier aujourd’hui vise à mieux expliquer nos métiers de façon très opérationnelle : ce que nous faisons au jour le jour dans le cadre de nos activités de développement, par rapport à d’autres acteurs comme l’AFD, bailleur de fonds, mais également par rapport à des ONG ou des petites entreprises, des petits opérateurs que le GRET soutient. Tout cela aide à mettre ensemble les acteurs de l’eau et à décloisonner les générations et les métiers. C’est notre première participation au forum, par contre le fonds Suez Initiatives soutient le Réseau Projection depuis déjà plus d’un an.

 

Jean-Denis : Que pensez-vous de cette première matinée en terme d’ambiance ?

 

Jean-Pierre Mas : J’ai trouvé intéressant qu’il y ait plusieurs stands où les jeunes étudiants et les jeunes professionnels puissent trouver des informations importantes sur ce que font les uns et les autres, les différents acteurs du développement et de l’eau. J’ai participé cet après-midi à la table ronde sur les PPP [Partenariats Public-Privé] et les débats étaient très intéressants. Quatre présentateurs ont présenté leur expérience professionnelle, plus humaine même que technique, et c’était très intéressant de voir comment chacun présentait son expérience, et d’avoir un dialogue avec les étudiants.

 

Jean-Denis : Que pensez-vous du fait qu’il y ait des plus en plus de jeunes qui s’intéressent au développement et au sort des pays en voie de développement ?

 

Jean-Pierre Mas : Je crois que c’est important parce qu’il y a énormément de besoins. Ce sont des besoins qui sont un peu nouveaux, les pays du Sud se développent de plus en plus et n’attendent pas une attitude caritative des pays du Nord. Par contre, ils ont des besoins bien spécifiques et c’est important que des professionnels comme nous puissent témoigner de ce qu’ils font au Sud. Cela permet aux étudiants et aux jeunes professionnels d’avoir une vision plus claire de quel peut être leur rôle demain, au sein d’une entreprise, d’une ONG ou d’une collectivité.

 

Jean-Denis : Merci !

 

Le site de Suez Environnement : http://www.suez-environnement.fr/




Interview de Liliane Chauffrey

Chef de service Développement Durable de l'Agence de l'Eau Seine Normandie (AESN)

 

 

 

 

Guillaume : Est-ce que vous pourriez vous présenter en quelques mots ?

 

Liliane Chauffrey : Bonjour, je suis Liliane Chauffrey et je représente l’Agence de l’Eau Seine Normandie. C’est un établissement public de l’État qui dépend du ministère de l’environnement. Nous sommes six Agences sur le territoire français et notre mission est de travailler sur la protection de la ressource en eau.

 

Nous avons trois grands principes dans le domaine de la gestion de l’eau en France : travailler sur un territoire spécifique, celui du bassin versant ; le principe de la gouvernance, c’est-à-dire que nous avons des comités de bassins composés de l’État, de tous les usagers de l’eau à parité ; le troisième principe, c’est que l’eau paie l’eau. Nous pouvons donc aider des travaux d’amélioration de la qualité de la ressource en eau ou de protection de la ressource en eau grâce aux redevances que nous avons prélevées auprès des usagers en matière de pollution ou de prélèvement d’eau.

 

Nous aidons tout ce qui est protection de la ressource. L’assainissement est une part très très importante dans nos activités – tout ce qui va être stations d’épuration, réseaux d’assainissement – mais également prévention de la pollution à la source. À l’heure actuelle, les grands défis, c’est de prévenir la pollution à la source, donc on a travaillé sur l’assainissement urbain, sur tout ce qui est ponctuel. On a travaillé également avec tout le secteur industriel pour arriver à avoir des technologies plus propres, qui prélèvent moins et qui polluent moins. Les grands défis à l’heure actuelle, ce sont toutes les pollutions diffuses, qu’on n’arrive pas à mettre dans des tuyaux. Travailler sur ce problème en matière d’agriculture, en matière de protection des captages et des ressources en eau.

 

Guillaume : Qu’attendez-vous d’une journée comme celle-ci, au Forum DEFIS SUD 

 

Liliane Chauffrey : Les Agences se sont mobilisées et se mobilisent dans des opérations de solidarité internationale. Pour l’AESN, nous avons commencé en 1997 sur des opérations ponctuelles, un peu partout dans le monde. Au début c’était surtout aider à l’alimentation en eau potable. Et puis, en 2004, la Cour des Comptes nous a reproché de dépenser de l’argent pour des bénéficiaires qui n’étaient pas sur le bassin. La loi Oudin-Santini permet maintenant aux Agences et aux collectivités de pouvoir consacrer jusqu’à 1% de leur budget Eau et Assainissement au domaine de la solidarité sur l’eau et l’assainissement. Nous soutenons des projets solidarité eau et assainissement au Sud donc nous travaillons avec des collectivités françaises ou des associations françaises qui viennent vers nous pour avoir un soutien financier. On essaie de plus en plus d’être à l’amont des projets pour participer à leur définition et essayer qu’ils entrent plus sur des projets de développement sur un territoire donné, et ne soient pas uniquement des petits projets ponctuels qui, on s’en rend compte, ne sont pas forcément viables. C’est une façon de communiquer, et les projets que nous soutenons, les infrastructures d’eau et d’assainissement doivent être accompagnées de mesures d’accompagnement, de transferts de compétences vers les populations envers lesquelles nous agissons. Transferts de compétences Nord-Sud, mais aussi des transferts de compétences Sud-Nord : il y a toute une expérience que l’on peut acquérir au Sud et qui est très enrichissante pour les personnes du Nord. Quand on nous a proposé de participer à ce forum DEFIS SUD, j’ai trouvé cela formidable, car cela permet de mobiliser les professionnels dans les échanges Nord-Sud, Sud-Sud, Sud-Nord etc.

 

Guillaume : Je suppose que vous avez vu beaucoup d’étudiants sur votre stand, quelles ont été leurs attentes, leurs questions ?

 

 Liliane Chauffrey : Je n’étais pas beaucoup sur le stand, j’ai plus circulé sur le forum ! Donc je ne peux pas trop répondre…

 

Liliane Chauffrey : Pour le forum d’Istanbul ou pour le forum de Marseille, l’Agence a pour habitude, en amont du forum, de faire des ateliers internationaux. Avant Istanbul, ça a été un atelier sur l’assainissement urbain. Pour Marseille, ça va être un atelier sur la gestion des eaux pluviales, et là, nous voulons absolument avoir la présence de collectivités du Sud qui viennent nous donner des retours d’expérience. En définitive, ces retours d’expérience nous servent après pour améliorer nos projets. Autre point, on travaille avec les collectivités territoriales du bassin puisque ce sont elles qui nous proposent de subventionner des projets, et ces collectivités territoriales ont de grandes compétences avec leurs services techniques. Ces services techniques nous disent toujours que quand les services techniques du Nord vont sur des projets au Sud, c’est très enrichissant ! C’est vrai qu’on a des expériences à prendre partout. Ce n’est pas uniquement du Nord-Sud, on capte aussi beaucoup de choses du Sud vers le Nord. Ce qui est formidable après, c’est aussi le Sud-Sud.

 

Guillaume : Merci beaucoup !

 

Le site de l’AESN : http://www.eau-seine-normandie.fr/

 


 

Interview de Laurent Rosso

Directeur adjoint d’AgroParisTech

 

 

 

Clémence : Est-ce que vous pourriez vous présenter en quelques mots ?

 

Laurent Rosso : Je suis Laurent Rosso, je dirige l’École Nationale du Génie Rural des Eaux et Forêts, qui est une école interne d’AgroParisTech [http://www.agroparistech.fr/], et à ce titre je suis directeur adjoint d’AgroParisTech. Initialement, je suis de formation universitaire normalien et ingénieur et j’ai travaillé beaucoup en entreprise, dans l’agro-industrie. Je ne suis donc pas trop dans les secteurs de la forêt au départ, mais plutôt sécurité alimentaire et agro-industrie – Danone, pendant une dizaine d’années. Après, j’ai rejoint Martin Hirsch, pour m’occuper des laboratoires de la recherche à l’AFSA, au moment où on a créé l’Agence [Française] de Sécurité des Aliments, et après 7 ans de pilotage de la recherche et des structures je me suis retrouvé ici pour organiser l’évolution et la fusion de nos écoles en un seul établissement, puisque AgroParisTech est un établissement qui existe depuis 2007 et l’Engref est une école interne. On a donc eu tout un ensemble d’accompagnements au changement et de mutations à faire depuis 4 ans.

 

Clémence : Pourquoi avoir accepté d’héberger le forum DEFIS SUD ?

 

Laurent Rosso : C’est une bonne question ! D’abord, comme vous avez remarqué, je n’ai pas pu assurer votre accueil ce matin, c’était mon adjoint [Philippe Bonneau]. Pourquoi ? Parce que j’arrivais de Ouagadougou ! J’ai passé quatre jours au Burkina Faso dans le cadre de discussions que nous avons avec deux IE, des écoles Inter-états qui fonctionnent à Ouaga, et des discussions que l’on a eues avec le Cameroun et d’autres pays pour continuer nos partenariats, notamment sur le secteur de l’eau puisque l’Engref travaille depuis des années avec ces structures dans des partenariats de formation. Et puis pour voir aussi comment on peut participer au développement d’activités, à des formations professionnelles et initiales sur l’agriculture et l’alimentation.

 

Donc notre savoir-faire habituel, ce n’est pas uniquement la formation franco-française, c’est depuis très longtemps la formation liée aux pays du Sud. Nous avons d’ailleurs un centre AgroParisTech à Montpellier qui s’occupe des questions autour de l’eau dans l’ensemble des pays, en particulier dans les pays du Sud [Mastère Eau Pour Tous, http://www.agroparistech.fr/-International-Executive-Master-OpT,1729-.html]. Il s’intéresse aussi aux aspects écosystémiques – gestion des écosystèmes au Maroc, dans le Bassin du Congo, en Asie. Et puis à AgroParisTech Paris on a des gens qui travaillent depuis très longtemps dans le développement agricole dans tous les pays du monde. Donc cela va de soi ! On a des partenariats avec l’AFD qui sont ici présents, on travaille actuellement pour une offre commune pour le Forum Mondial de l’eau qui va avoir lieu à Marseille, on développe des offres de formation professionnelle qui intéressent l’ensemble des pays, et en particulier des cadres dirigeants, pour former les patrons des services.

 

Eve : Est-ce que vous savez si des étudiants d’AgroParisTech sont venus à DEFIS SUD ? Ce que cela pourrait leur apporter, en tant qu’étudiants ingénieurs agronomes ?

 

Laurent Rosso : La manifestation DEFIS SUD a fait l’objet de beaucoup de communication dans l’établissement. Je pense que des étudiants ont du venir – on ne les trace pas ! En fonction de leurs disponibilités de cursus, ls seront probablement là demain, parce que c’est plus facile pour eux de venir le samedi. D’autant que, traditionnellement, les ingénieurs de l’ex-Agro, maintenant AgroParisTech ou Engref, voire même ceux qui travaillent dans les industries alimentaires, sont très investis dans les secteurs du Sud, par vocation. Il y a beaucoup de jeunes qui travaillent dans des ONG, dans des organisations ou des entreprises internationales, y compris à l’AFD, donc cela ne m’étonnerait pas qu’ils soient là demain.

 

Clémence : Par rapport à cela, qu’est-ce que vous pensez du poids de la voix des jeunes dans ces métiers et dans les services essentiels dans les pays du Sud ? Est-ce que vous pensez qu’ils ont leur mot à dire ? Est-ce qu’ils ont une légitimité ?

 

Laurent Rosso : Je pense que la première légitimité, c’est l’enthousiasme. Pour faire ce métier, pour travailler dans ces pays, pour aider et accompagner l’évolution durable de l’ensemble de ces pays, il faut d’abord avoir beaucoup de courage et d’enthousiasme, et surtout avoir beaucoup d’ouverture. Il est hors de question de faire du transfert de modèle, il faut savoir comprendre, il faut savoir s’adapter et apporter le mieux que l’on peut dans une logique partenariale, et non en donnant des leçons. En règle générale, ils sont légitimes parce qu’ils sont humbles. Nos étudiants, on a tendance à dire qu’ils sont formés par le vivant, et la formation par le vivant, ça rend humble. Donc en règle générale, ils s’adaptent et ils sont légitimes de par leur humilité.

 

Eve : C’est un thème que l’on a beaucoup abordé, l’adaptabilité des jeunes professionnels qui travaillent au Sud et qui sont confrontés à des problèmes qui ne sont pas les mêmes que ceux que l’on peut rencontrer au Nord. Est-ce que dans le cursus d’AgroParisTech, il y a des ouvertures proposées pour expliquer ce que l’on peut faire pour s’adapter ?

 

 Laurent Rosso : Cela dépend des cursus dont on parle. À AgroParisTech, il y a une grande école, ce que l’on appelle une « Executive Education ». Grande école, ça veut dire la formation ingénieur/master/docteur, et dans chacune de ces formations, il y a des spécialisations pour ce type de métiers. Par exemple, dans la formation ingénieur, il y a des dominantes, donc des 3èmes années, qui sont spécialisées dans l’agriculture comparée [UFR Agriculture comparée et développement agricole, AgroParisTech : http://www.agroparistech.fr/-UFR-Agriculture-comparee-et-.html]. Donc ce sont des gens à qui on apprend à prendre conscience des enjeux locaux.

 

Ensuite, vous avez en master des spécialités qui sont tournées sur ces pays, ou dans des environnements dits « du Sud ». Par exemple, une mention de master qui s’intéresse à la complexité et aux systèmes de gestion et dont la spécialité est la gestion durable des écosystèmes tropicaux forestiers ["Gestion environnementale des écosystèmes et forêts tropicales / Foresterie Rurale et Tropicale" 

http://www.agroparistech.fr/geeft/Enseignement/Geeft/Geeft.htm].

 

On a un centre à Kourou [Guyane], qui est un département français mais très proche des fonctionnements des pays en voie de développement. Ces jeunes sont formés à comprendre les enjeux de gestion. En Executive Education, c’est-à-dire formation professionnelle, formation des cadres-dirigeants, on a un mélange de publics entre des Haïtiens, des Togolais, des Français, des Sud-Américains qui partagent les mêmes objectifs sur la gestion de la ressource par exemple, ça apprend beaucoup.

 

 Eve : Merci beaucoup.

 

 Le site d’AgroParisTech http://www.agroparistech.fr/ 

Mastère Eau Pour Tous, AgroParisTech Montpellier http://www.agroparistech.fr/-International-Executive-Master-OpT,1729-.html

l’UFR Agriculture comparée et développement agricole, AgroParisTech 

http://www.agroparistech.fr/-UFR-Agriculture-comparee-et-.html

 

 

 

Interview de Loïc Fauchon


 

Clémence : Bonjour. Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?

 

Loïc Fauchon : Je m’appelle Loïc Fauchon, je suis le président de la Société des Eaux de Marseille et le président du Conseil Mondial de l’Eau (http://www.worldwatercouncil.org/).

 

Clémence : Que pensez-vous, en tant que président du Conseil Mondial de l’Eau, de l’avancée dans les Objectifs du Millénaire pour le Développement ? Êtes-vous plutôt optimiste ?

 

 Loïc Fauchon : Je suis optimiste de nature, mais la raison m’impose de considérer que l’on est quand même un peu en retard sur les objectifs, notamment sur l’assainissement. Le taux de couverture en eau potable est plutôt bon si l’on raisonne à l’échelle de la planète. La prise de conscience sur l’assainissement est un peu tardive par rapport au démarrage des objectifs et il va falloir accélérer un peu la course, d’autant que la croissance démographique est telle que non seulement il faut rattraper le retard, mais en plus il faut tenir compte de tous ceux qui arrivent sur la Terre. Et ça fait un peu beaucoup par rapport aux moyens qui sont engagés.

 

Clémence : Par rapport à votre parcours plus personnel : ce que vous faites aujourd’hui est-il en adéquation avec vos idéaux de jeunesse ?

 

Loïc Fauchon : J’attendrai l’âge de la retraite pour répondre – ça ne saurait tarder ! Oui, sans doute, parce que j’ai toute ma vie servi le public et assuré des responsabilités de service public, même dans une entreprise privée, même dans une association que je préside depuis très longtemps. Et servir le public c’est la plus belle des choses, c’est défendre l’intérêt public. On a tendance à considérer qu’il n’y a que les gens qui sont dans ce que l’on appelle le « service public », c’est-à-dire l’administration, qui le font , et c’est une erreur. Qu’on soit dans une association, qu’on soit dans une organisation indépendante, qu’on soit dans une entreprise, qu’on soit bien sûr dans une administration, il y a toutes sortes de moyens de servir le public, et quelque part, toute une vie, cela doit rester un idéal.

 

Clémence : Merci beaucoup.

 

Conseil Mondial de l’Eau http://www.worldwatercouncil.org/

Forum Mondial de l’Eau http://www.worldwaterforum6.org/?lang=fr

Objectifs du Millénaire pour le Développement http://www.un.org/fr/millenniumgoals/

 

 

 

Interview de Léo Giordano

Chef de projet Processus Thématique au sein du secrétariat du Forum Mondial de l’Eau?


Léo Giordano : Bonjour, je m’appelle Léo Giordano, nous sommes venus ici présenter le Forum Mondial de l’Eau qui se passera en mars 2012 à Marseille, en France, pour discuter avec les étudiants et le jeunes professionnels et leur expliquer la façon dont ils pouvaient contribuer au Forum et y participer en mars.

 

Clémence : Très bien, merci. Et pourquoi participer à ce Forum DEFIS SUD ?

 

L.G : Nous avons choisi de venir et de participer au Forum DEFIS SUD pour justement toucher un public plus large que les professionnels séniors avec lesquels nous travaillons d’habitude et avoir une discussion avec, comme je l’ai dit, les étudiants et les jeunes professionnels qui sont l’avenir de la profession et la relève, en quelque sorte, et que nous voulons impliquer davantage dans ce 6ème Forum. Nous avons déjà fait certains efforts dans les Forums précédents, mais ce coup-ci, sur Marseille, l’implication devrait s’avérer plus forte.

 

Guillaume : C’est-à-dire,  quels efforts ont été faits ?

 

L.G : Jusque à présent, ça commence seulement mais on a créé un des 4 processus. Le Forum est organisé autour de 4 processus : le processus politique qui vise à faire de l’eau une priorité au niveau mondial avec les différents acteurs politiques, tels que les gouvernements, les parlementaires et les autorités locales ; un processus thématique qui identifie les 15 priorités du Forum tels que l’accès à l’eau, à la croissance verte, en passant par l’eau et l’énergie ou l’eau et l’agriculture, la sécurité alimentaire ; un processus régional qui vise à renforcer l’action au niveau des grandes régions du monde : l’Asie, l’Amérique, l’Afrique et l’Europe, et enfin un processus local et citoyenneté qui, justement,  vise à renforcer l’action envers le grand public pour sensibiliser les gens à ces grands enjeux du 21ème siècle qui sont liés à l’eau. Et donc, c’est dans ce cadre-là que nous commençons à faire des démarches envers les jeunes, les étudiants et les jeunes professionnels, et c’est pour ça que nous sommes ici. 


Clémence : Est-ce que vous êtes plutôt optimiste par rapport à l’atteinte des OMD ?

 

L.G : En termes d’eau, c’est surtout pour nous l’accès à l’assainissement et aux « basic toilets for all » et l’objectif sur l’environnement également. Est-ce que nous sommes particulièrement optimistes ? Je ne peux pas parler au nom du Forum entier, je peux parler à titre personnel, je pense qu’il y a des efforts importants qui ont été faits et que c’est fantastique que la coalition internationale ait défini ces objectifs-là en 2000. Comme vous en avez sûrement entendu parler, il y en a pas mal qui ne seront sûrement pas atteints d’ici 2015 mais ça a créé un mouvement très positif et on espère que s’ils ne sont pas atteints en 2015, ils seront atteints dans les années suivantes. Et le Forum participera, de fait, à rassembler les acteurs pour atteindre ceux qui concernent directement le monde de l’eau.

 

Clémence : Merci beaucoup !

 

Forum Mondial de l'Eau  http://www.worldwatercouncil.org/?

Objectifs du Millénaire pour le Développement  http://www.un.org/fr/millenniumgoals/?

 

 


Interview de Laurent Chabert d’Hières

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Directeur d’Eau Vive, chef de file de la Coalition Eau & de Gérard PAYEN, Conseiller pour l’Eau et l’Assainissement auprès du Secrétaire Général des Nations Unies


 

Eve : Bonjour ! Pourriez-vous vous présenter en quelques mots et nous dire quelle organisation vous représentez à DEFIS SUD ?

 

Gérard Payen : Je m’appelle Gérard Payen et je suis conseiller pour l’eau et l’assainissement auprès du Secrétaire Général des Nations Unies, Monsieur Ban Ki-Moon.

 

Laurent Chabert d’Hières : Je suis Laurent Chabert d’Hières, je suis le directeur de l’ONG Eau Vive, ONG qui est elle-même animatrice/coordinatrice de la Coalition Eau qui est un regroupement d’une trentaine d’ONG françaises qui travaillent dans le secteur de l’eau au sens large.

 

Eve : Pourquoi avez-vous voulu participer à DEFIS SUD, et pourquoi avez-vous accepté de venir inaugurer le forum ?

 

Gérard Payen : Sur notre planète, chaque jour, on utilise d’avantage d’eau. Chaque jour, on la pollue. Hélas, la moitié de l’humanité n’a pas accès au service public de l’eau. Il y a donc énormément de choses à faire, il faut faire beaucoup plus pour l’eau et cela sera de plus en plus compliqué, et pour cela on a besoin de vous ! On a besoin des jeunes bien sûr. C’est vous qui allez trouver les solutions aux problèmes qui ne sont pas résolus aujourd’hui.

 

Laurent Chabert d’Hières: Pour moi, il y a deux raisons majeures. La première, c’est que l’on est tout le temps à l’affût, à la recherche de nouvelles compétences. Pas forcément parce que l’on offre des postes tous les matins, mais parce que c’est bien d’identifier en amont les gens qui peuvent être amenés un jour ou l’autre à rejoindre la structure.

 

La deuxième raison, c’est que l’on parlait ce matin à trois voix : une autorité publique, l’Agence Française de Développement ; Gérard, qui vient du monde du privé, et moi-même, qui suis du monde des ONG : un milieu de l’eau qui travaille de plus en plus en concertation et qui mêle ce que l’on appelle le « multi-acteurs » comme une des solutions de l’accès à l’eau et l’assainissement. Toute occasion est donc bonne pour parler à plusieurs voix, dans le même sens, de ces problématiques.

 

Eve : Je vais peut-être vous rappeler vos souvenirs d’étudiants ou de jeunes professionnels, mais est-ce que pour vous, le Forum DEFIS SUD aurait été une initiative à laquelle vous auriez voulu participer à l’époque où vous débutiez dans votre carrière ? Qu’est-ce que cela aurait pu vous apporter ?

 

Gérard Payen : A l’époque où j’étais étudiant, j’étais très sensible aux questions de développement. Donc peut-être que, si le Forum DEFIS SUD avait existé, je serais venu pour ça. Par contre, étant français, ayant vécu toute ma jeunesse en France, l’eau n’était pas un problème pour moi. Je n’ai eu aucune idée de la valeur de l’eau avant l’époque où, plus âgé, dans ma carrière professionnelle, j’ai été confronté à l’Arabie Saoudite.

 

Je ne sais plus très bien si ce genre d’initiatives existait. Nous avions de grandes discussions avec mes amis, mes camarades, sur les problèmes de développement, mais, je vous dis, ce n’est pas l’eau qui venait en premier. C’étaient plutôt les questions politiques, les questions de développement économique, de pauvreté. L’eau n’était pas un souci parce qu’en France, on ne sait pas ce que c’est que la valeur de l’eau, on ne sait pas ce que c’est que de manquer d’eau. On avait probablement une vision un peu théorique de la problématique de l’eau en Afrique : on a tous en tête l’image d’une jeune femme qui porte une cruche sur la tête ! C’est vrai, c’est un des sujets, mais il y a d’autres enjeux, bien plus compliqués à résoudre, hélas.

 

Je suis ravi que le Forum DEFIS SUD organise une rencontre avec des jeunes qui pourraient éventuellement orienter leur carrière sur les questions d’eau parce qu’on en a besoin, et on a besoin d’une diversité de métiers. Ce n’est pas un métier simple, c’est un métier compliqué : il y a de la technique, les problèmes de relations humaines, de relations institutionnelles sont fondamentaux. On a donc besoin de compétences assez variées, de vraies compétences. Je suis ravi que le Forum DEFIS SUD y réfléchisse avec vous. 

 


 

Laurent Chabert d’Hières : Cela ne me rajeunit pas non plus cette question-là ! C’est vrai que s’il y avait eu le Forum DEFIS SUD à l’époque, c’est-à-dire dans les années 70, cela m’aurait probablement aidé sur deux points. Le premier, c’est qu’à l’époque, quand on était volontaire dans une ONG, il n’y avait pas du tout ce secteur d’activités d’aujourd’hui que représentent les ONG. A l’époque, c’était les humanitaires, les médecins, c’était tout petit ! J’ai eu cette expérience de volontaire, mais quand je suis rentré en France, je n’avais personne pour m’aider à continuer dans cette filière que je pensais être la mienne – les ONG, c’est mon truc depuis longtemps. Mais j’étais tout seul pour voir comment continuer là-dedans. Ca manquait un peu de réseautage, de relations.

 

La deuxième chose, c’est que le Forum DEFIS SUD m’aurait peut-être aidé à comprendre que c’est dans le secteur de l’appui au développement qu’était ma place, non pas dans un rôle d’ingénieur, de fabriquant, de maître d’œuvre sur place. J’ai fait des puits dans ma vie, il vaut mieux passer assez vite sur cette expérience parce que je ne suis pas certain que l’impact ait été vraiment déterminant. Le Forum DEFIS SUD m’aurait donc aidé à comprendre que c’était dans le financement, dans la mobilisation, en Europe, dans le plaidoyer, dans le multi-acteurs, dans l’intégration des ONG dans tous les acteurs qui travaillent dans l’eau et l’assainissement, que c’était là qu’était mon rôle peut-être le plus efficace. Il valait mieux que j’arrête de faire des puits parce que d’autres le feraient beaucoup mieux que moi.

 

Eve : Une question un peu plus personnelle : est-ce que ce que vous faites aujourd’hui, au quotidien, correspond à ce que vous vouliez faire quand vous étiez jeune ?

 

Gérard Payen : Je crois que, dans la vie, il faut à la fois avoir des envies, des idées, des ambitions, mais aussi saisir des occasions. Pour ce qui me concerne, ce que je fais aujourd’hui est absolument passionnant, mais jamais je n’aurais imaginé, il y a encore quelques années, que je pourrais faire ça. Je crois qu’il faut savoir saisir les occasions, ne pas les rater, et savoir faire des choix de temps en temps.

 

Par contre, aujourd’hui, je suis passionné par l’eau. Je pense que ceux qui travaillent dans l’eau le sont souvent parce que c’est un métier dans lequel on a une réelle utilité sociale. On contribue à la santé des gens, on leur permet de se développer, y compris économiquement, c’est extrêmement gratifiant sur ce plan-là. Actuellement, je ne le fais plus sur le terrain, je le fais dans la Communauté Internationale, mais elle a bien besoin d’orientations concrètes. Je crois y être utile, donc je ne regrette absolument rien, par contre jamais je n’aurais imaginé pouvoir faire ça étant jeune. Donc n’hésitez pas à rentrer dans l’inconnu !

 

Laurent Chabert d’Hières : J’ai conservé peut-être une chose très importante, c’est cette espèce de folie de vouloir sauver le monde. A l’époque, il y a 30 ou 40 ans, j’allais le faire à moi tout seul ! Aujourd’hui, j’ai compris que je n’y arriverais pas tout seul, que j’allais peut-être contribuer, avec plein d’autres gens, à résoudre une partie du problème, parce que cela va être long de faire en sorte que tout le monde ait accès à une eau de qualité et à un service minimal d’assainissement, c’est quand même le minimum que l’on puisse proposer aux êtres humains. J’ai mis un peu d’eau dans mon vin, c’est le cas de le dire ! Mais j’ai toujours la même flamme, je suis plutôt content de ça.

 

La deuxième chose, c’est que par contre je n’avais pas imaginé être directeur. Ca, je ne le souhaite à personne, parce que le directeur, il arrive le lundi matin, et pendant toute la semaine il ne va avoir que des soucis et des problèmes à résoudre de toutes natures. Je n’avais pas du tout prévu ça, ce côté flux-tendu d’une multitude de questions qu’on va vous poser, de réponses à apporter – parfois il faut faire illusion parce que les réponses, on ne les a pas forcément, mais il faut quand même réagir. Je n’avais pas imaginé cela, mais je ne suis pas mécontent, je suis de plus en plus excité par mon travail, par Eau Vive, par le rôle qu’on a en Afrique, en France. Je suis grave de ce côté-là : plus ça va, plus je suis intéressé par ce que je fais ! Il faut vraiment que je me soigne !

 


 

Eve : Merci beaucoup !

 

Le site de la Coalition Eau : http://www.coalition-eau.org/

Le site d’Eau Vive : http://www.eau-vive.org/

Le site de l’ONU pour l’eau et l’assainissement : http://www.unwater.org/

 


 

Interview d'Albeidou Mohamadou (RAIL-NIGER)

Clémence : Bonjour, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

 

Albeidou Mohamadou : Je suis AlbeidouMohamadou, je suis ingénieur du Génie Sanitaire, et je participe maintenant au Forum DEFIS SUD en tant que chargé de mission de la cellule de renforcement de compétences en assainissement, qui pilote un projet(…)  monté et semé en binôme entre le Réseau Projection Paris et le Réseau d’appui aux initiatives locales. C’est à ce titre que je participe à ce forum.

 

Clémence : Que faites- vous concrètement sur le terrain ?

 

Albeidou Mohamadou : Sur le terrain, comme le nom du projet  l’indique, c’est un renforcement de compétences des acteurs nigériens de l’assainissement. Qui dit « renforcement de compétences » dit maintenant toute l’identification des besoins et la mobilisation des acteurs pour que la mise en œuvre concrète du renforcement de compétences puisse se passer dans les meilleures conditions. Donc, à ce stade du projet, nous avons pu définir les besoins, c’est-à-dire cibler les  bénéficiaires, définir avec eux leurs besoins et maintenant, nous sommes sur le point de commencer les supports de formation. C’est-à-dire, tout ce qu’il y a comme outils : les objectifs, les moyens et les outils pédagogiques pour élaborer les supports avec lesquels les formations proprement dites pourront se passer.

 

Clémence : Avez-vous vu des avancées conséquentes ces dernières années dans le domaine des Services essentiels dans votre région ?

 

Albeidou Mohamadou : Oui, j’ai eu des avancées. Aujourd’hui, si je voyage en France, c’est vraiment dans le cadre des services urbains essentiels, c’est vrai qu’au Sud, c’est des aspects qui sont assez timides, j’ai participé à un débat sur les villes en développement, c’est-à-dire l’accroissement urbain et les services qui suivent (…), ça ce n’est pas tout à fait des priorités pour les gens, mais avec effectivement certains aspects auxquels nous, nous participons pour venir partager avec les gens. C’est assez évocateur. Donc, je me dis qu’il y a pas mal de progrès ces dernières années. Ça démarre et j’espère que ça va résolument aller de l’avant.

 

Clémence : Que conseilleriez-vous aux jeunes qui souhaitent travailler dans le secteur des SE dans les PED ?

 

Albeidou Mohamadou : Je ne sais pas ce que vous voulez dire par conseils concrètement ?

 

Clémence : C’est-à-dire, dans quel domaine est-ce qu’ils pourraient s’investir,  qu’est-ce qu’il faut comme capacités, comme compétences pour travailler au Sud ?

 

Albeidou Mohamadou : Pour les services urbains essentiels au Sud, le parent pauvre c’est surtout l’assainissement. Que ce soit (…) la gestion des déchets solides ou la gestion des déchets liquides. Ce n’est pas du tout une priorité pour les gens, et, pour ce qui est de l’eau potable, il y avait eu beaucoup de créneaux avec la DIEPA (Décennie Internationale pour l’Eau Potable et l’Assainissement)  et l’atteinte des objectifs des OMD. Il y avait eu (…) beaucoup d’opportunités, ce qui fait que beaucoup d’ingénieurs s’y sont intéressés. Et d’ailleurs, pour la plupart de nos formations du Sud, c’est effectivement sur l’aspect eau potable et hydraulique que les gens mettent l’accent. Tout ce qui est de la question de l’assainissement, que ce soit la gestion des eaux usées et excrétas, tout comme la gestion des déchets solides sont pris en annexe dans la formation.

 

C’est les mêmes ingénieurs hydrauliciens ou génies civiles qui font tous ces aspects, mais aujourd’hui je pense qu’avec les problèmes auxquels nous sommes de plus en plus confrontés, beaucoup de dispositions sont en train d’être prises pour que maintenant les choses changent résolument. Bon, la preuve, on l’avait dit ce matin à l’ouverture, que ce n’est pas tout simplement en étant ingénieur que l’on peut occuper certains moyens des services urbains essentiels donc il y a tout un travail de réflexion à mener pour que vraiment les choses se passent pour l’avenir dans de meilleures conditions.

 

Donc, moi je conseille vraiment aux jeunes qui vont embrasser les services urbain essentiels pour le Sud de beaucoup insister sur les questions d’assainissement, surtout les déchets solides et la gestion des eaux usées et excrétas. Ça, c’est vraiment des créneaux qui sont encore porteurs ; l’eau potable, beaucoup de gens maîtrisent encore, les opportunités sont du coup un peu plus limitées que dans l’assainissement, les eaux usées et les déchets solides. Vous savez, il y a beaucoup plus de créneaux et beaucoup plus d’opportunités. 

 

Clémence : Merci beaucoup !

 

RAIL-NIGER : http://railniger.net/




Interview de Ta Thu Thuy

 

 

Clémence : Bonjour, est-ce que vous pourriez vous présenter en quelques mots ?

 

Ta Thu Thuy : Je m’appelle TA Thu Thuy, je suis sortie de cette école, de l’ENGREF, donc je suis très très contente de revenir et je suis plutôt en fin de parcours, à l’inverse de la majorité des gens qui sont dans ce forum. Depuis 1990, je suis consultante dans le domaine de l’eau de l’assainissement, de l’environnement, des déchets, aussi bien en France qu’en Afrique, mais j’ai surtout beaucoup travaillé dans l’Afrique Sub-saharienne.

 

Clémence : Et que faisiez vous concrètement sur le terrain en Afrique ?

 

Ta Thu Thuy : Alors comme je suis consultante indépendante et que j’ai toujours travaillé en grande indépendance, je dirais que je suis intervenue principalement à deux grands moments dans les projets : ou à la définition des projets, ou à l’évaluation des projets. Mais le plus souvent quand même au démarrage, à la mise en place des politiques, et puis, une des choses qui m’a le plus plu dans ce que j’ai fait c’est d’avoir participé à des programmes de Recherche/Action  dans le domaine de l’eau, de l’assainissement, des déchets avec Ps-Eau et le Programme Mondial de l’Eau. Voilà un petit peu les grandes lignes.

 

Clémence : Pourquoi êtes venue au Forum DEFIS SUD pour intervenir sur le débat sur les déchets ?

 

Ta Thu Thuy : Alors je suis présente au Forum DEFIS SUD, tout d’abord parce que j’ai été invitée par Célia de Lavergne et Julien Gabert. Je connais Projection depuis son tout tout démarrage, je dirais depuis sa naissance. J’ai eu la chance de participer au séminaire de lancement de Projection, ensuite à un atelier à Niamey et je suis vraiment très contente d’être à DEFIS SUD, je trouve que Projection est vraiment une plate-forme pleine d’imagination. Je vis des moments que je n’ai jamais vécu pendant toutes mes années, ne serait-ce que là, à être interviewée par vous ! (rires)

 

Clémence : Que conseilleriez-vous aux jeunes qui souhaitent travailler dans le secteur des Services Essentiels dans les pays en développement ?

 

Ta Thu Thuy : Pour faire très court, je dirais : « il faut foncer ! », il ne faut surtout pas avoir peur, avoir beaucoup d’imagination et vous en avez de toutes façons, il faut avoir de l’assurance et vous en avez, donc j’ai en tous cas pleinement confiance dans les nouvelles générations.

 

Clémence : Et une dernière question, à quoi rêviez-vous lorsque vous avez décidé de travailler dans ce secteur ? Vous aviez des idéaux, des ambitions ?

 

Ta Thu Thuy : Alors oui, c’est vrai que j’avais des rêves, j’avais des ambitions, je rêvais d’améliorer les conditions de vie en Afrique et c’est pour ça que j’ai été amenée à travailler sur le domaine de l’eau, de l’assainissement, des déchets. Oui, je rêvais que la situation s’améliorerait et que peut-être j’apporterais ma petite pierre. Je dirais que j’ai beaucoup déchanté, parce que je m’aperçois que à la fin de ma carrière, les problèmes sont certainement décuplés, se posent différemment, très différemment, et heureusement qu’il y a des jeunes qui arrivent avec une envie différente, une façon de travailler différente et le Forum DEFIS SUD en est vraiment l’illustration. Et c’est pour ça que j’ai vraiment l’impression– je vais utiliser des grands mots c’est vrai – j’ai un peu l’impression d’être, que vous êtes à l’aube d’un monde très très différent de ce qu’il était il y a 20 ans, ou il y a 30 ans.

 

Clémence : Merci beaucoup !

 

Réseau Projection http://www.reseauprojection.org/?




Interview d' Olivier Gilbert

Délégué aux innovations sociales, Veolia Environnement

 

 

Clémence : Est-ce que vous pourriez vous présenter en quelques mots ?

 

Olivier Gilbert : Je suis Olivier Gilbert et actuellement je suis délégué aux innovations sociales de Veolia Environnement [http://www.veolia.com/fr/], c’est-à-dire en charge de l’adaptation de nos métiers pour répondre aux besoins des clients défavorisés, aux gens qui n’ont pas encore accès aux services que nous gérons sur les territoires dont on nous a confié la gestion de services d’eau, d’assainissement, de déchets, de transports et d’énergie.

 

Clémence : Concrètement, que fait Veolia sur le terrain ?

 

Olivier Gilbert : Sur l’ensemble du terrain, c’est une histoire qui a près de 160 ans, Veolia ! Nous sommes gestionnaires de services d’eau, de propreté, de transport et d’énergie, après une histoire où l’on a eu d’autres services à gérer. Nous travaillons pour le compte de clients qui sont en général, mais pas uniquement, des clients publics, à savoir des villes, des pays comme l’État du Niger, l’État du Gabon, ou des collectivités locales comme la ville de Tanger ou la ville de Guayaquil en Équateur.

 

Nous gérons, c’est-à-dire qu’au quotidien, nous avons la gestion, sous le contrôle de l’autorité publique, de la bonne marche de services. En général on fait appel à nous lorsqu’il y a des changements à opérer dans un service – par exemple parce qu’il y a une nouvelle loi sur l’environnement, que l’on doit modifier les investissements, contrôler plus ce qui se passe entre le service et l’environnement, atteindre des objectifs en terme d’amélioration de la qualité des services pour les clients, pour les habitants, ou des investissements nouveaux à faire. Nous sommes là pour, tout en assurant la bonne marche du service, aider les autorités à réaliser les changements dans la politique du service.

 

Clémence : Pourquoi avoir choisi d’être partenaire du Forum DEFIS SUD ?

 

Olivier Gilbert : Le Forum DEFIS SUD, c’est une moins longue histoire que l’histoire du Groupe, mais il se trouve que je connais le Forum DEFIS SUD à travers [Réseau] Projection, que je connais depuis le démarrage pour avoir eu comme collaborateurs des gens qui ont été fondateurs de Projection. Nous pensons que le Forum DEFIS SUD est une excellente initiative, à la fois pour tisser un lien entre les jeunes professionnels du Nord et du Sud qui ont le même type d’emplois, pour faire de l’échange sur leur vécu, sur leurs conditions de travail, sur des expériences que l’on connaît moins dans le Nord mais qui sont très importantes et qui ont pu être menées dans le Sud, et aussi pour profiter du foisonnement d’informations qui existent dans le Nord sur tous ces sujets.

 

C’est excellent de créer ce genre de partenariats, aussi pour transmettre de vrais messages, des messages qui sont basés sur la réalité du terrain et pas seulement sur des préjugés, même s’il y a de bons préjugés. Il faut aujourd’hui communiquer, désenclaver, c’est bon pour l’esprit, c’est bon pour les futurs services dans lesquels les jeunes travaillent. DEFIS SUD est un des événements majeurs qui est organisé par Projection, qui nous permet à nous professionnels de pouvoir présenter nos métiers aux futurs responsables des services de demain, qui sont déjà pour certains en charge de services ou d’une partie des services, que ce soit au Nord ou au Sud, puisque nous, Veolia, nous intervenons aussi bien au Nord qu’au Sud.

 

Clémence : Justement, en tant que professionnel, pourquoi intervenez-vous dans le débat sur le dialogue entre professionnels au Sud ?

 

Olivier Gilbert : Cela fait 20 ans que je suis dans le groupe, et avant d’être délégué aux innovations sociales, j’y ai fait pas mal de métiers mais toujours opérationnels, travaillant dans des villes, sur des territoires, à la bonne marche de services d’eau, d’assainissement et de déchets. J’ai travaillé notamment pendant 7 ans au Maroc, où j’étais directeur de l’assainissement de Tanger-Tétouan, et je suis devenu directeur du Développement Durable pour l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Inde, tout en habitant au Maroc. J’étais en charge de développer l’accès à l’eau, à l’assainissement dans les quartiers périphériques qui avaient été créés avec l’exode rural autour des grandes villes. Au début j’étais tout à fait néophyte ! J’ai beau ne plus être jeune professionnel, on était tout à fait jeunes sur ce métier-là. Je sais à quel point dans nos métiers il faut savoir dialoguer avec toutes les parties prenantes – les habitants, les autorités. Nos propres salariés sont souvent des agents locaux que nous encadrons mais qui sont locaux et qui resteront locaux une fois que le contrat sera terminé.

 

Il faut aussi savoir dialoguer avec les associations, et c’est d’autant plus important lorsqu’on travaille sur des sujets comme l’innovation sociale dans les bidonvilles où, là, on ne peut réussir que si l’on agit avec rigueur mais aussi en partenariat. Premièrement avec les habitants eux-mêmes – il faut d’abord écouter ce qu’ils ont à dire sur leurs besoins, leurs demandes -, et deuxièmement avec les autres acteurs qui ont des expertises complémentaires aux nôtres – toutes les ONG. On a travaillé avec Rail, Karkara, Care, la Croix Rouge par exemple au Niger, nous travaillons avec l’AESVT, l’Association des Enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre, au Maroc, et c’est très important parce qu’ils ont des expertises qui sont fondamentales pour nous aider à dialoguer avec les populations, à faire de l’évaluation socio-économique, parfois même à recouvrer le montant des factures dans des endroits où nos agents ne sont pas habitués à travailler. Eux y travaillent mieux, notamment les associations de micro-crédit. C’est donc fondamental, aujourd’hui, si l’on veut réussir, de travailler véritablement en partenariat public, privé, société civile, et agences des Nations Unies.

 

Clémence : Et ce que vous faites aujourd’hui est-il encore en adéquation avec vos idéaux de jeunesse ?

 

Olivier Gilbert : Je vais dire, comme d’autres l’ont dit : moi je me sens encore jeune ! Quand on a la chance de travailler dans des métiers tels que ceux de Veolia, à moins d’être vraiment très étrange, on ne peut être que passionné par l’intérêt de ces métiers-là, le balcon que cela offre sur le développement des villes, sur la ville aujourd’hui. Que ce soit du point de vue technique, du point de vue financier, du point de vue marketing, c’est extraordinaire la richesse de ces métiers. Moi, je n’ai pas vu du tout le temps filer, j’ai une vie personnelle très remplie, j’ai une vie professionnelle très intéressante et je me sens toujours aussi jeune. Je dirais que cela correspond effectivement à mes idéaux qui ne sont pas morts, et j’en ai de plus en plus des idéaux, croyez-le bien !

 

En effet, ces métiers ont du sens. Il y a de la technique, de la finance, il y a du relationnel, de la communication, mais cela a du sens. Pour moi, c’est important de travailler sur des métiers qui ont trait au développement de la ville, à l’évolution du monde dans lequel on vit, et en plus sur ma spécialisation d’aujourd’hui, sur l’accès aux services essentiels pour les populations défavorisées, et de façon très concrète, pas du tout dans la théorie, mais vraiment sur le terrain, avec des programmes d’évaluation qui évaluent l’impact réel de ce que l’on fait pour les populations elles-mêmes. Travailler sur l’humain, pour moi cela correspond à quelque chose d’important, à un idéal qui est toujours le même, et que j’espère bien conserver longtemps !

 

Clémence : Un conseil pour les jeunes qui souhaitent travailler chez Veolia ?

 

Olivier Gilbert : Comme conseil, il y a pas mal de jeunes qui sont intéressés par Veolia, on doit répondre à beaucoup de jeunes qui viennent nous voir, qui sont intéressés, qui ne connaissent pas très bien ou qui ont du mal à comprendre. Je leur dirais : renseignez-vous, venez nous voir, nos métiers doivent se développer, ils doivent évoluer en permanence pour correspondre véritablement à la demande de nos clients – les villes, les clients privés aussi comme les industriels qui peuvent nous déléguer, et aux populations, qui sont en plein évolution.  Il faut de la curiosité, ce sont des métiers où il faut aussi beaucoup d’endurance. Même si nos métiers sont passionnants, on n’est pas souvent remercié, notamment quand on va travailler dans des pays dont on rêve – je suis comme vous, j’ai vécu ici en France, et je rêvais de partir vers des ailleurs, et j’ai trouvé ces ailleurs, et c’est là où il faut être encore plus humble, et je dirais savoir qu’on n’est pas attendu comme on imagine l’être.

 

En revanche on est attendus de manière très concrète, très sérieuse, sur les métiers que l’on doit faire. Il faut être endurant parfois parce qu’on est dans le temps long, on ne voit pas l’aboutissement tout de suite de ce que l’on fait – que cela soit chez Veolia ou en ONG – quand on travaille dans ces métiers d’accès à l’eau, à l’assainissement, aux déchets dans le Sud mais aussi dans le Nord. Il faut être endurant, il faut sans arrêt remettre sur la table le métier, le projet que l’on a, vérifier que l’on s’est tous bien compris, qu’il n’y a pas de malentendu. Il faut aussi et avant tout avoir un savoir-être, c’est-à-dire avoir une certaine humilité, avoir de l’écoute, ne pas arriver avec la tête grosse comme ça avec tout ce que l’on a appris. Il faut donc être curieux, endurant, à l’écoute, et puis bien sûr maîtriser quelques techniques dont l’entreprise aura besoin. C’est le challenge des ressources humaines à l’avenir, c’est très important pour un groupe comme Veolia, et c’est pour cela que c’est très important d’être ici aujourd’hui.

 

 Le site de Veolia Environnement : http://www.veolia.com/fr/



 

Interview croisée des partenaires du forum sur leur motivation et leur soutien à DEFIS SUD

 

 

Les interviewés :

 

 

 

 

Maurice BERNARD est responsable de la Division Eau et Assainissement à l’Agence Française de Développement (AFD).

 

 

 

 

 

 

 

Patrice FONLLADOSA est Directeur des Partenariats Stratégiques de Veolia Environnement. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Guy FRADIN est directeur de l’Agence de l’Eau Seine Normandie (AESN).

 

 

 

 

 

 

 

 

Bernard GUIRKINGER est Directeur Général adjoint de SUEZ ENVIRONNEMENT, en charge de la coordination des activités Eau, de la R&D, du Développement Durable et des Relations Institutionnelles. 

 

 

 

 

 

 

 

Laurent ROSSO est directeur adjoint d’AgroParisTech et directeur d’AgroParisTech Executive.

 

 

 

 

 

1- Pourquoi votre structure a-t-elle accepté de soutenir le projet du Forum DEFIS SUD ?

 

 

M. Bernard : Deux principales raisons ont amené l’AFD à soutenir ce projet : tout d’abord, au regard de l’urgence des situations que nous rencontrons dans les Pays en Développement, la participation et la bonne volonté de chacun est nécessaire. La démarche de sensibilisation à l’intérêt et à l’utilité des métiers du développement est légitime à cet égard.

 

Deuxièmement, dans la problématique générale d’aide au développement, le secteur le plus critique et le plus difficile est le développement des capacités, mais il ne peut véritablement exister que s’il y a une offre. Dans ce sens, l’intérêt d’avoir des jeunes professionnels dans ce secteur est particulièrement important.

 

 

P. Fonlladosa : Depuis plusieurs années déjà, VEOLIA EAU soutient le réseau Projection dont l’originalité est d’être centré sur des jeunes professionnels, passionnés par les métiers de l’eau et de l’assainissement et particulièrement engagés pour l’accès du plus grand nombre aux services essentiels. S’agissant du Forum DEFIS SUD, nous avons rapidement décelé tout l’intérêt pour nous de nous associer à cet événement qui a pour objectif de rapprocher les étudiants, les jeunes professionnels et les différents acteurs des métiers du développement.

 

C’est une occasion pour nous d’expliquer directement la réalité de nos métiers, de faire connaître leur diversité (souvent méconnue) et de présenter le cadre dans lequel nous les exerçons (aussi bien gestion déléguée que cadre plus industriel). Il s’agit donc d’une rencontre d’intérêts et d’enrichissements mutuels. C’est également pour nous une opportunité d’exposer nos points de vue d’entrepreneurs, notre vision -loin des débats idéologiques ou partisans - et permettant ainsi une mise en relation avec des personnes qui n’ont pas toujours l’occasion de rencontrer.

 

 

G. Fradin : A l'Agence de l'Eau Seine Normandie, la solidarité est au cœur de nos métiers, grâce à des aides financières accordées aux différents acteurs intervenant sur le bassin de la Seine dans une démarche en faveur du développement durable. Aussi sommes-nous très attachés à nos actions de solidarité internationale.

 

Dans ce cadre, nous avons choisi de soutenir le Forum DEFIS SUD qui s'inscrit parfaitement dans notre stratégie.

 

 

B. Guirkinger : Les besoins en matière de services essentiels au Sud sont considérables et pressants. S'il ne faut pas oublier le monde rural, les enjeux dans les villes sont particulièrement préoccupants et complexes, du fait de la rapide croissance urbaine et de l'augmentation de la population urbaine pauvre.

 

Pour SUEZ ENVIRONNEMENT, il est indispensable pour développer l'accès aux services essentiels d'amener une meilleure compréhension entre les acteurs et de renforcer les compétences de chacun. La démarche de Projection, en organisant le Forum DEFIS SUD, s'inscrit dans ce sens.

 

 

L. Rosso : AgroParisTech Executive est un acteur de premier plan dans la formation des cadres qui œuvrent sur le terrain à l'accès aux services essentiels dans les Pays en Développement (offre de mastères spécialisés et de formations courtes ouvertes aux défis des pays du Sud).

 

Il nous a donc semblé naturel d'associer notre expertise à celle du Réseau Projection pour participer à la réussite du forum.

 

 

2- Selon vous, en quoi DEFIS SUD se démarque-t-il des autres forums des métiers?

 

 

M. Bernard : Il est difficile de répondre à cette question: nous le saurons véritablement une fois que le forum se sera tenu ! En tous cas, le concept est séduisant. Et je fais confiance à Projection: d’abord, parce que Projection est un réseau.

 

Personnellement, c’est cela qui m’intéresse : le réseau social et la capitalisation entre générations. Ensuite, l’aide au développement est une grande école d’humilité et de formation, qui a peu d’égal. On y mesure notamment l’inexistence de modèles uniques et la complexité de processus de développement dans leur dimension sociale, économique, etc.

 

 

P. Fonlladosa : Ce qui m’a tout de suite intéressé dans le Forum DEFIS SUD et ce qui le différencie des autres forums, c’est l’organisation en deux espaces : d’un côté un espace un peu classique permettant aux différents acteurs de se présenter (stands), de l’autre un espace plus novateur qui permet la multiplication de débats ouverts favorisant donc les échanges et permettant à toutes les voix d’être entendues.

 

Par ailleurs, il se démarque également des autres forums des métiers très généraux car il s’adresse plus spécifiquement à un secteur, celui de l’accès aux services essentiels et notamment à l’eau, à l’assainissement et à la gestion des déchets. Il me semble que c’est le premier du genre et je suis convaincu qu’il répondra à une forte attente aussi bien des recruteurs que des étudiants et jeunes professionnels.

 

 

G. Fradin : Je pense que le Forum sensibilisera les jeunes aux enjeux des services essentiels, car je suis convaincu qu’ils ont un rôle à jouer dans les processus de réflexion et la mise en œuvre d’actions concrètes. Il me paraît primordial de leur proposer un encadrement, de leur donner la parole et de susciter une coopération entre les acteurs. Pour l’anecdote : j’ai moi-même créé, durant la première partie de ma carrière, une association comme le Réseau Projection pour l’entraide des jeunes professionnels ingénieurs dans les ministères.

 

La participation de jeunes professionnels du Sud et du Nord  et d’experts seniors donne également du sens à ce forum : les attentes et la réalité du terrain vont être mises en avant. Cela va permettre de véritables échanges entre les participants et de stimuler la réflexion et l’interaction entre les générations.

 

 

B. Guirkinger : Ce forum vise à décloisonner les générations et à créer du lien entre elles. Ce sont des objectifs qu'il faut soutenir. Faire participer des structures et des jeunes de pays du sud est également un des points forts du forum.

 

Il est par ailleurs positif que les jeunes professionnels démontrent leur capacité à faire avancer le débat et à aller de l'avant, et nous sommes prêts à les accompagner.

 

 

L. Rosso : Le Forum DEFIS SUD est porté par le Réseau Projection, on peut donc dire qu'il est fait pour et par des jeunes professionnels du secteur. Il a aussi gagné le soutien de parrains prestigieux, tant privés qu'institutionnels.

 

Il bénéficiera donc de toute l'expérience et de la connaissance du terrain, dans sa diversité et ses multiples dimensions, de cette communauté. Enfin sa construction, centrée sur le partage d'expériences, les échanges et les animations 'grandeur nature' nous a paru originale et fédératrice.

 


3- Quelles sont les attentes de votre structure vis-à-vis de ce forum DEFIS SUD ?

 


M. Bernard : L’AFD a deux grandes attentes : contribuer à faire émerger les acteurs de demain et faire connaître à ces acteurs le rôle des partenaires financiers, dont l’AFD fait partie.

 

 

P. Fonlladosa : Nous espérons que ce Forum sera l’occasion de rencontres intéressantes et de débats constructifs sur le sujet de l’accès aux services essentiels qui nous tient particulièrement à cœur. J’aimerais également qu’il soit également l’occasion de démontrer que les entreprises sont elles aussi, parmi les autres acteurs, de réelles parties prenantes du développement mettant en avant leurs capacités d’innovation - et encore plus dans les pays du Sud.

 

 

G. Fradin : J’espère que le forum sera un lieu d’émulation, d’idées et de projets et qu’il réussira le pari d’être pertinent et original.  Enfin, le Forum DEFIS SUD  favorisera  une réelle mobilisation pour d’autres évènements. Nous avons la chance d’accueillir en France, à Marseille, le 6ème Forum Mondial de l’Eau en 2012 : c’est une formidable opportunité. Je fais le vœu que les débats du Forum DEFIS SUD puissent apporter des contributions concrètes à ce forum.

 

 

B. Guirkinger : Le Forum DEFIS SUD doit favoriser la compréhension des enjeux liés aux services essentiels et montrer la diversité des métiers et des acteurs qui s'y engagent. J'espère que ce forum permettra aux jeunes professionnels, diplômés et étudiants de réaliser que les services de l'eau, de l'assainissement et des déchets, c'est avant tout des gens passionnés par leur métier et qui font preuve d'un grand professionnalisme. Et j'espère que ce forum suscitera ou confirmera des vocations, au Nord et au Sud.

 

 

L. Rosso : Ce forum sera pour nous l'occasion d'écouter les attentes en matière de formation, de comprendre les nouveaux besoins qui se font jour, mais aussi, bien sûr, de faire connaître notre engagement et de présenter nos programmes à un public qui est précisément celui auquel ils sont destinés : de jeunes diplômés et de jeunes professionnels, tous passionnés par les grands défis que sont aujourd'hui nourrir les hommes, permettre l'accès universel à l'eau et à l'assainissement, gérer et valoriser les ressources.